2022, une année pour le refus de cette misère tolérée qu’est l’absence d’un toit

Au soir de 2021, s’éteint une grande et belle figure d’humanité, Desmond Tutu, 1er évêque noir de l’église anglicane sud-africaine. Il reçut en 1984 le prix Nobel de la paix.

Ami de Nelson Mandela, il lui apporta une contribution décisive pour mettre un terme à l’apartheid, cet infâme désordre moral.

Sa vie spirituelle était un lien indestructible entre tous les hommes et Dieu, rien ne pouvant justifier une quelconque séparation. Il bouillonnait d’humour, de bienveillance et d’intelligence. Habité par la justice, il avait un sens profond du pardon là pour autant que la vérité se soit pas trahie, aucune raison, fût-elle celle de l’Etat, ne pouvant l’étouffer.

Desmond Tutu, une conscience ! Il réveilla un peuple, l’invitant à sortir d’un enfermement abject : refuser l’autre parce que de couleur différente.

L’absence d’un logement, alors même que le toit est un droit, ne s’apparente-t-elle pas à une forme d’apartheid. Excessive, cette qualification, diront certains et donc insignifiante ! Pourtant, être pauvre, n’est-ce pas être mis à part, rejeté ; une vive blessure, meurtrière de l’humain.

Sur tous les tons et sur tous les toits, il est rappelé depuis des décennies l’injustice faite aux plus vulnérables. Ils doivent attendre et attendre longtemps avant de disposer d’un logement. De 5 ans à 10 ans, parfois plus, dans les métropoles ! D’aucuns ne le trouvent jamais, d’où la rue, un jugement sans appel, signifié par un ‘dehors’ ! Quelle brutalité ; puisse-t-elle nous réveiller.

A ce drame s’ajoute le tragique d’une Société qui s’est habituée.

A la fin de la trêve hivernale, suspendue pour la première fois en 2021 par une décision juste de la Ministre du Logement, ce sont plus de 200 000 personnes – chiffres du ministère – qui devront trouver un habitat afin de quitter la précarité d’un hébergement.

Que de sans-domicile sont encore assignés aux trottoirs ou sous les ponts. Leur nombre a baissé en 2021, la crise sanitaire ayant contraint à augmenter le dispositif des nuitées d’hôtel (73 000 /jour au 1er juin 2021). Ce palliatif ne peut pas se pérenniser au nom de cet alibi, ne pas créer un appel d’air ; il est pour le moins vicié dans tous les sens du terme.

Que faire ? Des centaines de milliers de logements sont vacants dont 320 000 dans les grandes villes, là où l’absence d’un toit est cruelle.

Et si nous écoutions Victor Hugo dans son poème « Pour les pauvres » publié en jan vier 1830 dans les feuilles d’automne :

Dans vos fêtes d’hiver, riches, heureux du monde
Quand le bal tournoyant de ses feux vous inonde,
…..
Oh ! Songez-vous parfois que, de faim dévoré,
Peut-être un indigent dans les carrefours sombres
S’arrête, et voit danser vos lumineuses ombres
Aux vitres du salon doré ?

Aujourd’hui, que voient les ‘pauvres’ via la vacance des logements, moins de vitres éclairées et pour cause …Tout est fermé. N’y a-t-il rien à voir ? Si, une ombre que cette injustice criante.

L’heure n’est pas de jeter l’opprobre mais de transformer ce qui peut et doit l’être. Et si 2022 se révélait l’année d’une conscience éclairée, la vôtre, la mienne pour dire non à l’inacceptable.

Des vœux, non, des actes pour que les plus malheureux ne le demeurent pas, ils sont nos frères ; comment être heureux si les autres ne le sont pas.

La fraternité, fondement de notre société, revêt ici une acuité toute particulière. Le sujet n’est pas de rechercher des coupables, mais de voir comment nous pouvons concourir à une plus grande humanité. Ensemble, mettons en œuvre des propositions. Un combat qui donnera du sens à cette année.

Bernard Devert
Président du Haut Comité
1er janvier 2022

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