Parution de l’avis relatif au finacement de la politique d’hébergement
L’hébergement est aujourd’hui le réceptacle des défaillances d’autres politiques publiques (asile, justice, aide sociale à l’enfance, santé) et de l’insuffisance de l’offre de logements abordables. Malgré un recours historiquement élevé aux dispositifs d’urgence, les structures ne sont pas en capacité d’accueillir toutes les personnes en détresse. Les services de l’État, contraints par des enveloppes annuelles insuffisantes, adoptent une logique de gestion de la pénurie au détriment du droit. Le Haut Comité pour le Droit au Logement alerte dans cet avis sur les effets d’un sous-financement structurel du secteur de l’hébergement, qui fragilise la réponse aux besoins croissants des personnes sans-abri et remet en cause l’effectivité du droit à l’hébergement tel que défini par la loi.
Cette gestion engendre deux évolutions majeures : des restrictions d’accès pour certains publics – notamment les personnes sans titre de séjour, les jeunes sortant de l’ASE ou les personnes jugées « moins vulnérables » – et la mise en place d’un hébergement discontinu, limité dans le temps. Ces pratiques de tri et de remise à la rue remettent en cause à la fois l’inconditionnalité de l’hébergement (article L.345-2-2 du CASF) et le principe de continuité de l’accueil (article L.345-2-3). Elles instaurent une logique de gestion fondée sur des critères évolutifs et peu transparents, fixés localement en fonction des tensions sur les places. Le Haut Comité observe que la définition de la « vulnérabilité » devient une variable d’ajustement.
En parallèle, le financement des structures d’hébergement évolue vers un modèle plus précaire, centré sur la logique de subvention et de commandes publiques. Le passage progressif du régime d’autorisation à celui de déclaration et de subvention a accentué l’instabilité financière des associations, complexifié leurs procédures administratives, et affaibli leur autonomie. Les versements tardifs – jusqu’à 52 % des crédits versés en fin d’année – engendrent des tensions de trésorerie, compromettant leur capacité d’action, leur attractivité et la qualité de l’accompagnement.
Les associations se retrouvent prises dans une injonction paradoxale : faire toujours plus avec des moyens stables ou en baisse. Leurs marges de manœuvre pour innover ou adapter les réponses à certains publics spécifiques (sortants de prison, femmes victimes de violences, etc.) sont réduites. Dans un contexte d’inflation, de sous-compensation du Ségur social et de crise des vocations, le maintien d’un accompagnement digne devient de plus en plus difficile.
Le Haut Comité souligne que cette insincérité budgétaire fragilise le pilotage des politiques publiques : la régulation du nombre de places repose sur les contraintes financières, non sur l’évaluation des besoins. Cette logique remet en cause le droit à l’hébergement ainsi que la finalité même de l’hébergement comme levier de protection et d’insertion.
À cette fin, le Haut Comité formule plusieurs recommandations structurantes :
1. Instaurer une loi de programmation pluriannuelle fondée sur les besoins constatés, garantissant un budget sincère dès la loi de finances initiale et un calendrier stable de versement des subventions.
2. Revenir au régime d’autorisation pour les structures du secteur de l’accueil, de l’hébergement et de l’insertion (AHI), garantissant des dotations mensuelles sécurisées et un cadre de financement cohérent avec les missions du secteur.
3. Mettre en place des Conférences territorialisées des financeurs, pour mutualiser les ressources entre acteurs publics, coordonner les dispositifs proches (AVDL, ASLL) et assurer une lisibilité et une équité dans les financements.
Retrouvez ici : Avis du 26 mai 2025 concernant le financement de la politique d’hébergement