Et si la sève printanière ravivait la fraternité

L’hiver se termine. Qu’en est-il pour ceux qui connaissent les affres de la pauvreté se jouant de ce printemps pour annoncer la fin de la trève hivernale, galère pour un grand nombre.

Que faire.

Cette trève a donné 5 mois de répit au cours desquels les expulsions ont été suspendues. Vient l’heure de leur exécution. Un drame pour des mamans qui, seules, font face avec leurs enfants à des situations iniques pour être celles de l’abandon. Difficile d’oublier le chômage prolongé qui induit la perte de l’estime de soi, ouvrant grand les abîmes de la misère.

Notre attention, avons-nous besoin de le préciser, est portée aux personnes de bonne foi, confrontées à l’impossibilité d’assumer totalement le règlement de leur loyer et charges.

L’habitat est une protection ; il est aussi un droit défendu à la quasi-unanimité des parlementaires avec le Droit au Logement Opposable, bien connu par son acronyme le DALO. Seulement, si cette loi est heureuse, plus de 100 000 personnes sont encore en attente d’un logement alors qu’elles ont été reconnues comme éligibles à ce dispositif.

Une des causes majeures des expulsions, plus de 70 000 attendues, relève essentiellement de la pauvreté consécutive au décrochage entre le coût du logement et les revenus perçus, d’où l’inquiétude du Haut Comité pour le Logement, lequel s’est singulièrement investi sur le Droit au Logement Opposable, fort de l’engagement de l’un de ses membres, Paul Bouchet, membre du Conseil d’Etat, Président du Mouvement ATD Quart-Monde, ayant succédé à Geneviève de Gaulle-Anthonioz.

Depuis le début de la trève hivernale, et même bien avant, nombreux sont les acteurs du logement social qui ont appelé l’attention des pouvoirs publics et de l’opinion sur l’importance de la vacance : 400 000 logements inoccupés en Ile-de-France et dans les grandes Métropoles, là où la tension est la plus cruciale.

Que de toiles de tentes sur des trottoirs, les carrefours où sous les ponts jettent un voile pudique sans cacher la détresse de ceux qui n’ont rien, jusqu’à se voir refuser un abri.

Comment ne pas entendre le silence sur un phénomène réel, traité dans le cadre d’une pénalité peu contraignante. Le sujet n’est pas tant la réquisition qu’une aide déterminante aux bailleurs pour revaloriser leur appartement en les mettant aux normes. En contrepartie, il serait juste de leur demander qu’ils en ouvrent les portes à ceux notamment qui exercent des métiers, dits essentiels, insuffisamment rémunérés, les conduisant à être très éloignés de leur lieu professionnel. A la pénibilité du travail s’ajoute celle des temps de transport.

50 % des ménages reconnus au titre du DALO exercent une activité professionnelle dans les secteurs dits essentiels ; d’aucuns peinent à accéder à un logement digne.

Une bonne nouvelle cependant, vendredi 21 mars, à la Préfecture de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, la signature en présence du Haut Comité d’une convention entre l’Etat et Action Logement visant à mobiliser, conformément à la loi Molle de 2009, 25 % des attributions des logements sociaux, de ce grand acteur qu’est Action Logement, en faveur des ménages reconnus au titre du DALO.

Une avancée, certes, mais demeurent bien des verrous d’une Société qui, repliée sur elle-même, fait le lit d’un communautarisme rampant dans une indifférence qui devrait alerter tant elle met en échec les valeurs républicaines.

Paul Eluard écrit fort justement, quand les cimes de notre ciel se rejoindront, ma maison aura un toit.

Ce toit nécessite une charpente, n’est-elle pas signe d’une fraternité ; réveillons-la.

Bernard Devert
Mars 2025

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