Pour résoudre la crise du logement, une solution existe déjà. Pour en finir avec le mal logement des plus fragiles.
Pays, entends-tu ces cris sourds des populations fragiles mal-logées ?
Qui ne distingue pas le malaise des millions de travailleurs essentiels soulignant le peu de reconnaissance sociale dont ils disposent ? La rémunération des auxiliaires de vie, des aides-soignants, des éboueurs, des ouvriers de l’agroalimentaire et tant d’autres, alors que leurs horaires sont décalés, les oblige à se loger loin des lieux où ils s’investissent. Conséquence : des temps de transports qui ne font qu’aggraver la pénibilité de leur engagement.
Qui peut rester sourd au fait qu’un étudiant sur cinq a des conditions de vie inacceptables pour devoir supporter des loyers décorrélés de leurs ressources, d’où un reste pour vivre qui n’est pas sans affecter leur santé ?
Comment ne pas percevoir l’inquiétude relative au devenir des personnes hébergées, plus de 200 000 en France ? Et les toiles de tente qui essaiment dans les villes et métropoles ? La pauvreté connaît une telle visibilité qu’elle participe à l’accablement de la société, pensant que la Nation est désarmée devant le malheur d’une montée inexorable de la misère.
Pourtant, 370 000 logements sont vacants dans les villes selon le ministère du Logement. Là où la demande d’un toit est la plus forte. 130 000 à Paris, et 240 000 au total sur les 5 métropoles : Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille et Nice selon l’Insee (données 2020). Une hausse de plus de 50% en 20 ans.
L’heure n’est pas de jeter l’opprobre sur quiconque, conscients que nombre de ces propriétaires ont renoncé à la rénovation et la location de leurs biens faute d’avoir le savoir-faire, les capacités financières et/ou physiques nécessaires.
La vraie question est donc de savoir comment prendre en charge ce que ces propriétaires, souvent des personnes âgées, ne peuvent ou ne savent pas faire.
Notre réponse tient en deux mots : foncière solidaire.
Pour remettre des dizaines, voire des centaines de milliers de logements sur le marché locatif, il “suffirait” d’organiser un transfert de propriété, des particuliers vers une foncière solidaire, qui prendrait en charge la rénovation et la location du bien.
Comment ça fonctionne ? Prenons l’exemple d’un appartement vacant de trois pièces qui vaut actuellement 150 000 euros à Lyon. Concrètement, le propriétaire, ici un homme retraité de 75 ans, apporte l’usufruit du logement à une foncière, c’est à dire une société dont le métier est de gérer des biens immobiliers. En contrepartie, il souscrit au capital et devient actionnaire de la foncière pour le montant de l’usufruit. Cette dernière prend ensuite le relais. Elle se charge d’évaluer les travaux de remise aux normes du logement et les réalise en avançant les fonds propres nécessaires, 50 000 euros dans notre exemple.
Cette intervention est réalisée dans le cadre de l’usufruit dont la durée se détermine en fonction du coût des travaux et du temps nécessaire pour être remboursée des fonds propres avancés. Dans notre cas pratique, la durée sera de 14 ans. La foncière solidaire se charge également de trouver un locataire et veille à ce que le loyer soit adapté aux ressources de ceux qui peinent à se loger. Il sera de 300 euros par mois pour une aide-soignante célibataire avec son enfant de 4 ans, toujours dans notre exemple.
Pendant ce temps, le nu-propriétaire… ne fait rien. Il n’a plus ni charges opérationnelles, ni charge mentale. Au contraire, il bénéficie d’une réduction d’impôt sur le revenu représentant 25 % du montant de sa souscription, plafonnée à 50 000 € pour un célibataire, 100 000 € pour un contribuable marié ou pacsé avec un report en cas de dépassement sur les 4 années suivantes, dans la limite du plafonnement stipulé dans le dispositif IR-SIEG.
Le nu-propriétaire ne déclare pas le bien au titre de l’impôt sur la fortune immobilière. Il ne sera plus redevable de la taxe foncière, ni assujetti aux taxes sur les logements vacants pendant le temps que la foncière loue son logement. À la fin de l’échéance de l’usufruit, le propriétaire (lui ou ses héritiers) retrouve la pleine possession de son bien. Il peut alors donner ses parts détenues dans la foncière solidaire et perçoit une libéralité égale en l’état des textes à 75 % pour les premiers mille euros et 66 % pour les autres sommes dans la limite de 20 % du revenu imposable.
En contrepartie de cette donation, le donataire procède aux travaux de propreté.
Cette opération ne fait l’objet d’aucun droit de mutation. Le logement remis aux normes pourra ensuite être loué au prix du marché ou bien cédé si le propriétaire le souhaite.
Un tel dispositif ne met personne sur le podium de la charité ; il se construit à partir des intérêts bien compris. Pour les populations fragiles, c’est l’ouverture enfin espérée d’une porte permettant d’avoir des conditions de vie décente. Pour les propriétaires, c’est la revalorisation de leurs logements au lieu de payer des impôts sur des surfaces inoccupées. Pour l’État, c’est une action au service de l’intérêt général car aucune Société ne peut vivre dignement si elle ne se soucie pas du sort des plus fragiles.
Ce dispositif a la beauté de la simplicité. Il ne nécessite pas de changement législatif. Aucun frein technique ou financier ne semble pouvoir le contrarier. Et des foncières solidaires existent déjà, comme « Entreprendre pour Humaniser la Dépendance » d’Habitat et Humanisme. Dans un temps relativement court, moins de trois ans, ce sont plusieurs dizaines de milliers de logements qui peuvent être remis aux normes et aider autant de personnes à grandir en dignité.
Enfin, c’est une action collective qui doit conduire à la naissance de nouvelles foncières solidaires. Plus elles seront nombreuses, plus elles contribueront à la décarbonation de notre pays en éradiquant les passoires énergétiques.
Rappelons-nous, si le bien ne fait pas de bruit, puissions-nous entendre le tintement de clés qui ouvrent plus qu’un logement : un avenir. Et ce dès 2025, c’est-à-dire demain.
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